Ça va faire plusieurs semaines que je me tâte à écrire sur le sujet, tant l’attitude du gouvernement est incompréhensible (enfin si, mais dans le mauvais sens) mais également par le comportement un peu trop inflexible de certains groupes de Gilets Jaunes.


La fameuse lettre du Président

Cependant c’est la lettre de Macron qui me décide à prendre ma (frêle) plume pour en discuter et analyser ce fameux écrit. Décortiquons plusieurs parties ensemble :

Chez nous, ceux qui travaillent financent les pensions des retraités. Chez nous, un grand nombre de citoyens paie un impôt sur le revenu, parfois lourd, qui réduit les inégalités. Chez nous, l’éducation, la santé, la sécurité, la justice sont accessibles à tous indépendamment de la situation et de la fortune. Les aléas de la vie, comme le chômage, peuvent être surmontés, grâce à l’effort partagé par tous.

C’est pourquoi la France est, de toutes les nations, une des plus fraternelles et des plus égalitaires.

Dans ce cas pourquoi vouloir continuer à démanteler les services publics et notre modèle de société ?

C’est aussi une des plus libres, puisque chacun est protégé dans ses droits et dans sa liberté d’opinion, de conscience, de croyance ou de philosophie.

C’est pour cela que la liberté de manifester est en potentiellement en danger, que la loi sur les Fake News est très bancale et que les musulmans sont régulièrement ciblés (en ayant l’amalgame facile) par les politiciens (ceux de votre groupe et une bonne partie des autres).

Mais il y a pour cela une condition : n’accepter aucune forme de violence. Je n’accepte pas, et n’ai pas le droit d’accepter la pression et l’insulte, par exemple sur les élus du peuple, je n’accepte pas et n’ai pas le droit d’accepter la mise en accusation générale, par exemple des médias, des journalistes, des institutions et des fonctionnaires. Si tout le monde agresse tout le monde, la société se défait !

Pourtant c’est bien après l’une des manifestations les plus violentes que tu as cédé et que la violence policière semble être en forte hausse ces derniers mois. Non pas que ça excuse la violence faite aux forces de l’ordre, aux médias et aux fonctionnaires mais l’histoire à tendance à montrer la violence engendre la violence.

Pour moi, il n’y a pas de questions interdites. Nous ne serons pas d’accord sur tout, c’est normal, c’est la démocratie. Mais au moins montrerons-nous que nous sommes un peuple qui n’a pas peur de parler, d’échanger, de débattre.

Sauf quand ça concerne l’ISF (et quelques autres sujets) et la façon de revoir notre modèle économique et démocratique, mais on verra ça plus bas.

Je n’ai pas oublié que j’ai été élu sur un projet, sur de grandes orientations auxquelles je demeure fidèle. Je pense toujours qu’il faut rendre à la France sa prospérité pour qu’elle puisse être généreuse, car l’un va avec l’autre. Je pense toujours que la lutte contre le chômage doit être notre grande priorité, et que l’emploi se crée avant tout dans les entreprises, qu’il faut donc leur donner les moyens de se développer.

Déjà tu n’a pas été élu sur un projet mais contre le Front National, ensuite la meilleure méthode est de faire sortir les chômeurs du circuit pour améliorer les chiffres du chômage (sans pour autant régler leur situation) ? De même qu’offrir le CICE à toutes les entreprises sans aucune contrepartie et sans conditions préalables ?

Je pense toujours qu’il faut rebâtir une école de la confiance, un système social rénové pour mieux protéger les Français et réduire les inégalités à la racine.

En baissant le nombre de professeurs et d’aides à la vie scolaire ? En baissant les budgets de différents collèges/lycées/universités qui sont déjà en précarité budgétaire ? En mettant à la benne le plan Banlieue de Jean-Louis Borloo ?

Je pense toujours que l’épuisement des ressources naturelles et le dérèglement climatique nous obligent à repenser notre modèle de développement. Nous devons inventer un projet productif, social, éducatif, environnemental et européen nouveau, plus juste et plus efficace.

Tellement que Nicolas Hulot a décidé de se barrer parce que tu ne faisais pas grand chose de ce côté. De plus les quelques mesures que tu as mise en place ne le sont pas dans un grand plan d’ensemble qui rendrait les mesures acceptables ou cohérentes entre-elles.

Ce débat devra répondre à des questions essentielles qui ont émergé ces dernières semaines. C’est pourquoi, avec le gouvernement, nous avons retenu quatre grands thèmes qui couvrent beaucoup des grands enjeux de la nation : la fiscalité et les dépenses publiques, l’organisation de l’Etat et des services publics, la transition écologique, la démocratie et la citoyenneté. Sur chacun de ces thèmes, des propositions, des questions sont d’ores et déjà exprimées. Je souhaite en formuler quelques-unes qui n’épuisent pas le débat mais me semblent au cœur de nos interrogations.

Tu cadres pas mal le débat alors qu’au début tu disais qu’il n’y avait pas de questions interdites (que ça nous plaise ou non).

Le volet fiscal

Comment pourrait-on rendre notre fiscalité plus juste et plus efficace ? Quels impôts faut-il à vos yeux baisser en priorité ?

Nous ne pouvons, quoi qu’il en soit, poursuivre les baisses d’impôt sans baisser le niveau global de notre dépense publique.

Quelles sont les économies qui vous semblent prioritaires à faire ?

Je suis tout à fait d’accord sur le fait qu’il n’est pas possible de baisser les impôts sans baisser la dépense publique dans la forme actuelle (et encore, je serais d’avis qu’il soit possible de s’affranchir de la règle des 3% dans le cadre d’une réforme globale du fonctionnement de l’État).

Au niveau des économies, on peut parler d’une grande partie des niches fiscales qui n’existent que pour permettre à des minorités à s’enrichir bien grassement, on peut parler aussi des comités théodules existants ou le recasage dans l’administration pour payer des amis bien placés (ou les remercier) pour rien faire ou presque. De l’autre côté il est également possible de mettre certaines taxes qui profiteront à la très grande majorité de la population (taxe robot, une taxe Tobin à 0,005 ou 0,01%).

Faut-il supprimer certains services publics qui seraient dépassés ou trop chers par rapport à leur utilité ? A l’inverse, voyez-vous des besoins nouveaux de services publics et comment les financer ?

Il y en a plusieurs qui coûtent trop cher par rapport à leur utilité, mais la solution n’est pas forcément de couper dans les forces vives mais de modifier leur manière de fonctionner. Par exemple est-ce qu’il est pertinent de plafonner les montants des retraites et des indemnités chômage ? C’est un sujet qui pourrait être intéressant à débattre (si c’est une bonne idée ou non, si oui avec un plafond à quel hauteur, de quelle manière faire la transition, etc…).

De cette manière il serait possible de rediriger les économies vers d’autres services qui pourraient en avoir besoin (voir d’en développer certains).

Y a-t-il trop d’échelons administratifs ou de niveaux de collectivités locales ? Faut-il renforcer la décentralisation et donner plus de pouvoir de décision et d’action au plus près des citoyens ? A quels niveaux et pour quels services ?

Comment voudriez-vous que l’Etat soit organisé et comment peut-il améliorer son action ? Faut-il revoir le fonctionnement de l’administration et comment ?

Comment l’Etat et les collectivités locales peuvent-ils s’améliorer pour mieux répondre aux défis de nos territoires les plus en difficulté et que proposez-vous ?
  • Probablement. Oui. À débattre (et probablement à choisir en fonction des territoires).
  • À discuter. Oui, à voir comment.
  • À discuter

Moi et l’Ordre ou le Chaos

C’est un peu le résumé de ce qui s’est passé ces derniers mois. Étant donné qu’il n’arrive pas à comprendre les revendications des Gilets Jaunes parce qu’il n’a jamais été dans leur position, encore moins que celui de la majorité des (non-)élus.

De plus étant donné que lui-même et son équipe sont complètement déconnectés de la vie d’un français moyen, ce qui explique pourquoi il semble toujours répondre à côté et à contre-temps.

Ensuite ils ont décidés de passer en mode “Moi ou le Chaos” en dépeignant les Gilets Jaunes comme des extrémistes ou des fascistes en puissance. Étant donné que ça n’a pas fonctionné, ils sont passés en mode “Judge Dredd” où ils veulent être intraitable avec les manifestants quitte à mettre en danger la liberté de manifester des personnes d’une manière très bancale et dangereuse.

Et tout ça sans jamais faire faiblir le mouvement et le support à celui-ci. Preuve qu’il était à côté de la plaque tout le long et ça risque de durer avec le “Grand Débat National” qui commence sous de mauvais auspices.

La dernière chose que je souhaiterais aborder dans ce long billet est une mesure très demandée par les Gilets Jaunes, le R.I.C.


Alors quoi le R.I.C ?

Je vois qu’il y a beaucoup de fantasmes concernant le R.I.C, le Référendum d’Initiative Citoyenne, alors que celui-ci n’a encore été défini par personne. De fait avant d’avoir un avis tranché sur la question, il faudrait attendre de voir la forme du R.I.C qui émergera le plus.

À titre personnel, voici une première forme du dispositif que je trouverais intéressant :

Un pouvoir d’interpeller le gouvernement

Le principe serait de pouvoir questionner le gouvernement sur n’importe quel sujet, à l’image du système qu’avait mis Obama aux États-Unis pendant ses mandats. Les questions pourraient être soumise sur une plateforme gouvernementale puis une fois qu’elles atteignent 50 000 ou 100 000 votes par exemple, le gouvernement est tenu d’y répondre.

Dans les modalités, le gouvernement serait par exemple obligé d’y répondre sous un ou trois mois pendant une séance des Questions Au Gouvernement.

Un pouvoir d’initiative des lois

Des projets de loi provenant des citoyens pourraient être soumis au Parlement pour discussions et vote (que le vote soit positif ou non). Le dépôt et le vote de ces projets de loi se feront sur une plateforme numérique du gouvernement et pour déclencher l’étude des dits projets par le Parlement, il faudrait rassembler entre 500 000 et 1 million de votes.

On pourrait envisager un second seuil qui déclencherait un référendum automatique à 3 millions de votes par exemple (après analyse de sa constitutionnalité et de sa faisabilité technique et financière). Cependant c’est une mesure qu’il serait plus prudent de mettre en place quelques temps (au moins une mandature législative) après que la version ai été mise en place.

Et histoire de borner la chose et éviter les ping-pong, un même projet de loi (ou très similaire) ne peut être étudié qu’une fois par mandature législative. De même il n’est serait pas possible de déposer un contre-projet de loi sur une loi qui a été issu d’un R.I.C pendant la mandature législative actuelle et la suivante.

Un référendum automatique pour les réformes constitutionnelles

Cette mesure aurait dû être mise en place depuis longtemps, pour toute modification de la constitution, un référendum doit être engagé pour valider ces modifications.

Pas d’abrogatoire ni de révocatoire

Et comme vous pouvez le remarquer, je ne suis pas partisan pour un référendum abrogatoire et/ou révocatoire, du moins dans un premier temps. Je pense qu’il serait plus sage de s’habituer dans un premier temps au référendum d’initiative avant d’ajouter des roues au vélo.

Peut-être qu’après une mandature législative ou deux, on pourrait considérer à ajouter ces nouveaux pouvoirs.

Cette forme du R.I.C pourrait avoir je pense le consensus d’une grande partie de la population ainsi que de l’appareil politique.


Personnellement je ne comprends pas comment Macron et son équipe sont capables d’être mauvais à ce point-là, au point où je me demande si cela n’est pas fait à dessein dans l’optique de gagner les européennes. Ce serait affreusement cynique mais au point où on en est et le caractère de Macron, la probabilité n’est pas de zéro (mais ce serait une très mauvaise stratégie au final).

S’il a une réelle volonté de sortir de cette crise, tout ce que je vois pour le moment (parce que j’ai de gros doutes sur le Grand Débat) est le cocktail suivant :

  • Remaniement du gouvernement : ce qui ferait un grand bien tellement certains d’entre eux doivent avoir une carrière de pompiers pyromanes en bénévole (Castaner, Griveaux, Schiappa et Darmanin en tête, voir également Le Maire et Belloubet).
  • Dissolution de l’Assemblée Nationale : parce que l’énorme majorité de LREM à l’AN ne corresponds pas du tout à la pluralité de la population et ceux depuis les résultats des élections législatives. Ce qui aggrave le cas est la manière dont LREM est dirigé, ne laissant qu’extrêmement peu de liberté aux députés (tellement qui doivent quitter le parti ou se font virer quand ils dévient des consignes de votation).
  • Une forme R.I.C, celle que je propose par exemple (oui j’essaie :D)

J’espère que le Président prendra les bonnes décisions qui s’imposent et se rappeler qu’il a été élu pour représenter et aider tous les français, et non qu’une partie d’entre eux.